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Mars 2010 - LE CONTRAT D’AGENT COMMERCIAL : COMMENT FAIRE UN CAPITAL ?

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LE CONTRAT D’AGENT COMMERCIAL : COMMENT FAIRE UN CAPITAL ?

 

 

LE CONTRAT D’AGENT COMMERCIAL :

 

COMMENT FAIRE UN CAPITAL ?

Quelques éléments de conclusions et de rappels suite à l’intervention du 25 mars dernier (Journée des Agents Commerciaux).

Partantdu principe – pour les raisons développées et exposées lors de l’intervention du 25 mars dernier, portant essentiellement sur la définition de l’agent commercial (article L.134-1 et suivants du code de commerce), sur la nature du contrat d’agent commercial et ses caractéristiques, que la clientèle, bien que n’appartenant pas à l’agent commercial mais restant la « propriété » du mandant, est maintenue et développée par l’intervention, la prospection, la représentation, soit l’exécution du mandat qui lui est confié par l’agent commercial, il a été rappelé, affirmé et confirmé que le contrat d’agent commercial représente un bien disposant d’une valeur patrimoniale pour l’agent commercial qui de fait dispose d’un droit pécuniaire – droit impératif auquel il ne peut être dérogé.

 

 

 

En conséquence, à la cessation du contrat d’agent, du fait de l’arrivée du terme pour les contrats à durée déterminée, du fait  de la décision du mandant, ou du fait de sa propre décision de céder son contrat,l’agent commercial peut prétendre soit, dans les premières hypothèses, au paiement d’une indemnité compensatrice à la charge du mandant, soit, dans la dernière hypothèse, au paiement de la valeur de la carte cédée à un successeur.

 

 

Le contrat d’agent commercial représente ainsi une valeur patrimoniale incontestable, ledit contrat constituant un actif incorporel.

 

La cession de carte apparait ainsi comme un moyen de gérer son portefeuille – de cesser son activité – voire de mettre un terme “amiable” avec un mandant.

 

 

Les  questions sont ainsi de savoir :

–          Comment faire de ce contrat un capital ?

–          Comment gérer cette valeur, ce bien ?

–          Quels sont les droits et obligations respectifs de l’agent commercial et du mandant dans le cadre de la cession de son contrat ?

A)    LE PRINCIPE DU DROIT DE CESSION DE CARTE

 

 

Ainsi que rappelé, le contrat d’agent commercial est un actif incorporel disposant d’une valeur patrimoniale, et librement cessible par l’agent commercial.


Le droit de cession du contrat d’agent commercial est donc un droit impératif, auquel le mandant ne peut s’opposer sauf dans certaines conditions très restrictives, qui, à défaut d’être caractérisées,engendre pour le mandant l’obligation d’indemniser l’agent commercial par le paiement d’une indemnité compensatrice.

 

Le droit pour l’agent commercial de céder sa carte est prévu par les dispositions de l’article L.134-13-2° du Code de Commerce.

 

Le législateur a ainsi envisagé le droit de cession de la carte au profit de l’agent commercial, étant indiqué que les conditions et modalités dans lesquelles cette cession doit intervenir n’ont pas été fixées de façon précise et impérative.

A défaut de précision aux termes du contrat, il faut faire application de règles et principes généraux.

 

 

Quelques précisions à cet effet.

L’AGREMENT DU MANDANT

Le premier impératif pour l’agent commercial qui envisage de céder une carte, ou pour l’agent commercial qui envisage d’acquérir une carte, est de s’assurer de ce que le mandant puisse donner son agrément à la cession projetée.

L’agrément doit donc être préalable et est nécessaire pour que la cession puisse intervenir et être effective entre les agents commerciaux (l’actuel et le successeur).

Le mandant, dans la mesure où le contrat d’agent commercial est un contrat intuitu personae, a la possibilité de refuser l’agrément et de ne pas donner son accord sur la personne du successeur qui lui est présentée.

Néanmoins, ce refus d’agrément est strictement encadré, non pas par le législateur mais par la jurisprudence, qui exige que le refus soit justifié par des motifs légitimes et sérieux, à défaut de quoile refus s’analyse en une rupture de la part du mandant ouvrant droit à indemnité compensatrice.

Les cas de jurisprudence, surtout de la Cour de Cassation, sont rares.

Il peut être indiqué que ces « motifs légitimes et sérieux » concernent soit une question de moralité, soit – et généralement – des raisons professionnelles, par exemple du fait d’une incompétence avérée et caractérisée du successeur, les tribunaux restant toujours compétents et seuls juges de l’appréciation de la nature, de la gravité et des motifs invoqués par le mandant.

En revanche, si le refus est justifié, l’agent commercial n’a pas droit à l’indemnité compensatrice mais doit présenter un nouveau successeur.

 

 

Pour précision, les contrats d’agent commerciaux ne peuvent prévoir des clauses contraires à la cessibilité du contrat d’agence lesquelles sont réputées non écrites, et ce en raison de la valeur patrimoniale résultant de la cessibilité du contrat imposé par le caractère d’ordre public de l’article L134-13 du code de commerce.

Il n’est pas nécessaire – et même déconseillé – de prévoir aux termes d’un contrat d’agent commercial l’obligation pour l’agent de présenter au moins 2 ou 3 successeurs, un seul refus injustifié étant  par principe sanctionnable.

Pour information, le mandant a la possibilité de demander à rencontrer et à discuter avec le successeur présenté.

L’ABSENCE DE MODIFICATION DU CONTRAT

 

Il sera également rappelé – élément essentiel et extrêmement important à connaître – qu’à l’occasion et dans le cadre de la cession de la transmission du contrat envisagé par l’agent commercial, si l’agrément du mandant est nécessaire, qu’il soit exprès ou tacite – il ne peut être imposé par le mandant à l’occasion de la cession et en contre-partie de l’agrément donné de modifications des clauses contractuelles – de quelque nature que ce soit – au successeur.

En effet, dans le cadre d’une cession de contrat, le contrat cédé est le contrat qui est en vigueur dans toutes ses clauses et exclusivement dans lesdites clauses, toute modification réalisée sans l’accord de l’agent s’analysant alors en une modification unilatérale et discrétionnaire de certaines clauses du contrat de l’agent commercial et par conséquent en un refus d’agrément.

En effet, l’agrément doit être donné purement et simplement sans être conditionné à une quelconque modification d’aucune clause.

Ainsi, il n’y a que substitution de la personne de l’agent commercial mais le contrat reste effectif et doit être exécuté tel qu’il était et dans les conditions et modalités fixées entre l’agent commercial précédent et le mandant.

B)    LA CESSION DE CARTE EN PRATIQUE

 

 

Le préalable à toute cession, comme précisé plus avant, est donc d’obtenir l’agrément du mandant.

Deux possibilités :

a/ le contrat qui doit être cédé prévoit et encadre les modalités de cession

 

Application et respect de la clause contractuelle et des conditions et modalités prévues – sous réserve qu’elle ne soit pas contraire à l’ordre public

b/ le contrat d’agent commercial qui doit être cédé ne prévoit aucune disposition

Application des principes généraux

                                                                                                         

Demande d’agrément

–          A formuler par écritpour des raisons de preuve – et bien évidemment par recommandé avec AR (le cas échéant en informant préalablement le mandant par voie orale)

 

–          Fixer au mandant un délai raisonnable pour se positionner – le délai raisonnable étant de l’ordre de 15 jours à 1 mois (fonction de la durée du contrat, de la nature des produits ou services…)

 

Le mandant se positionne

Le mandant ne se manifeste pas

a/ Il agrée le successeur : la cession peut être régularisée ou entérinée

 

b/ il refuse le successeur, auquel cas :

–          Si le refus est justifié : il faut présenter un nouveau successeur

 

–          Si le refus est injustifié et illégitime : il faut formuler une demande d’indemnité compensatrice pour rupture du contrat par le mandant

Si le mandant ne se manifeste pas dans le délai « raisonnable » imparti, l’absence de réponse ou de refus explicite vaut agrément tacite ou implicite

 

La cession peut être envisagée mais la prudence veut que l’agent envoie un nouveau courrier recommandé au mandant pour acter cet agrément tacite et la nécessité de prévoir un avenant pour prendre en compte la substitution du successeur

 

Conseil : il est toujours recommandé de prévoir – dans le contrat de cession dans l’hypothèse où il est régularisé avant l’agrément du mandant – une condition suspensive liée à l’obtention de l’agrément du mandant.

Une telle clause consiste à subordonner l’effectivité de la cession, et ainsi le paiement du prix de cession de la carte, à l’agrément exprès donné par le mandant pour éviter de se retrouver dans une situation de transfert d’une carte inexploitable ou que le mandant refuse d’exécuter avec le successeur.

Bien évidemment, le contrat de cession peut également n’être régularisé qu’une fois obtenu l’agrément exprès du mandant.

Concernant le contrat de cession entre l’agent commercial “en place” et l’agent commercial “successeur”, il est essentiel de prévoir un certain nombre de clauses notamment :

 

–          le prix de cession

–          la question des commissions de retour sur échantillonnage à déterminer de façon précise

–          les éventuelles modalités d’information et d’assistance, le plus généralement de “passage”, du contrat entre le cédant et le cessionnaire (étant généralement prévu dans le contrat de cession une période de 6 à 8 mois pour permettre le transfert de la clientèle entre les agents commerciaux)

–          la question éventuelle d’une clause de non-concurrence à la charge du cédant, si cela s’avère nécessaire

–           

REMARQUE : la cession peut être totale ou uniquement partielle (ne portant que sur certains secteurs géographiques et / ou sur certains secteurs).

AUTRES CONSEILS PRATIQUES

 

S’il n’existe pas de contrat écrit, il appartiendra alors au cédant de rapporter la preuve de l’étendue précise de son contrat en rassemblant le maximum d’éléments sur la nature des produits représentés et sur le secteur géographique (factures, mails, compte-rendu,…).

 

Bien évidemment, dans cette hypothèse, le risque pour le cessionnaire est d’autant plus grand qu’il n’a pas de cadre écrit lui permettant de connaître précisément le contrat qui lui est confié et dont il doit assurer la représentation.

Il parait donc indispensable dans une telle hypothèse d’exiger de la part du cédant la confirmation écrite des clauses essentielles du contrat (produits ou services, secteur géographique, exclusivité ou non, taux de commission, notamment).

Il pourra ainsi, au moment de la demande d’agrément formulée auprès de son mandant, être rappelé expressément les conditions, clauses et modalités essentielles à l’exécution du contrat.

Si le contrat est écrit, bien évidemment une analyse approfondie de celui-ci permettra au cessionnaire d’éviter les pièges ou de connaître les engagements précis à l’égard du mandant.

Enfin, concernant le cédant, il est indispensable, et dans le cadre de la question de l’agrément du mandant, de s’assurer des compétences, de l’expérience, de l’ancienneté et des aptitudes professionnelles du cessionnaire, mais également de ses aptitudes et capacités financières notamment pour assumer le paiement du prix de cession.

A cet effet, il conviendra de fixer avec précision les modalités de règlement de ce prix de cession (comme il conviendra ainsi que déjà indiqué, de déterminer le sort des commissions de retour sur l’échantillonnage).

Concernant le cessionnaire, il lui appartiendra d’analyser la nature et l’objet de la carte notamment le secteur d’activité et son domaine, la clientèle à visiter, les produits et les services représentés, les exigences éventuelles du mandant, les obligations mises à la charge de l’agent commercial, les questions du taux de commission et des conditions de paiement de celles-ci, la nécessité ou non, pour l’exercice de cette carte ou de ces cartes, de recruter du personnel pour pouvoir assumer et assurer l’exécution de la carte, les impacts financiers et les investissements nécessaires,…

 

 

Pour une cession globale d’une entreprise ou d’une affaire, il convient de s’assurer de sa rentabilité en prenant en considération le chiffre d’affaire réalisé et les montants des frais et investissements, en se faisant là encore conseiller, outre le personnel juridique, par un professionnel comptable.

Là encore, dans le cadre d’une cession globale, il est extrêmement important de pouvoir obtenir la communication de tous les contrats par écrit ou au moins une confirmation écrite des clauses essentielles si le contrat est oral, étant indiqué que le transfert ou la cession de contrat peut être l’occasion, pour un contrat oral, de prévoir un contrat écrit et de rappeler là encore qu’il est indispensable et impératif qu’aucune clause ne soit modifiée, la cession de contrat ne pouvant être l’objet d’une modification unilatérale et discrétionnaire imposée par le mandant.

Après avoir analysé et s’être attaché à vérifier l’ensemble de ces éléments, et une fois que l’agrément du mandant est obtenue de façon expresse, le contrat soit est régularisé a postériori en faisant constater la réalisation de la condition suspensive, soit le contrat est tout simplement signé prenant acte de l’agrément du mandant.

QUELQUES ÉLÉMENTS DE NATURE FISCALE

Pour information, le contrat de cession doit être enregistré au Centre des Impôts du lieu de domicile de l’une des parties.

DROITS D’ENREGISTREMENT

à la charge du cessionnaire

 

Jusqu’à un prix de cession de 23.000 € :

aucun droit

De 23.000 € à 200.000 € :

3% du prix de cession

Au-delà de 200.000 € :

5% du prix de cession

 

PLUS VALUES PROFESSIONNELLES

à la charge du cédant

 

Base du taux d’imposition :

 

–          différence entre le montant du prix de cession et prix d’acquisition du mandat

–          si création de la carte : prix de cession

AGENTS COMMERCIAUX SOUMIS AUX BNC

–          si les recettes HT sont inférieures à 90.000 € HT : application de l’exonération des plus-values professionnelles à condition que soient réunis ces 3 critères :

·avoir exercé l’activité depuis au moins 5 ans

·conclusion du contrat depuis au moins 2 ans

·ne pas avoir excédé au titre des recettes HT, depuis les exercices, le montant de 90.000 € (en cas de cessation ou d’activité en cours d’année, il est fait un prorata des recettes de la dernière année sur une période de 12 mois)

 

 

–          si les recettes HT sont supérieures à 90.000 € HT

 

Le montant de la plus-value s’ajoute aux recettes d’exploitation si le contrat a été exercé pendant moins de deux ans, et dans l’hypothèse où le contrat cédé a été exécuté pendant plus de deux ans, la plus-value est imposée au taux de 28,1 % (depuis 2009).

AGENTS COMMERCIAUX SOUMIS A L’IS

Depuis le 1er janvier 1997, la taxation réduite des plus-values a été supprimée pour ces personnes morales.

La plus-value dégagée lors de la cession s’ajoute au résultat d’exploitation de la personne morale soumise à l’IS et est ainsi imposée au titre de l’IS.

 

 

 

En conclusion

 

Les cartes d’agent commercial représentent une valeur patrimoniale incontestable, qu’il convient de conserver et de transmettre dans les meilleures conditions afin de rentabiliser et d’optimiser le travail et les prestations effectuées.

Il est de fait opportun de pouvoir assurer cette transmission dans les meilleures conditions et ainsi de penser et d’envisager sa succession suffisamment tôt.

Quant au cessionnaire, acquérir une carte déjà développée présente incontestablement des avantages, le seul conseil étant d’acquérir une ou des cartes qu’après réflexion, analyse et avec prudence.

Dans tous les cas, l’assistance, l’expérience et l’éclairage deconseils sont fortement recommandés.

 JohannaAZINCOURT

Avocat à la Cour d’Appel de RENNES

Photo : Mars 2010 - LE CONTRAT D’AGENT COMMERCIAL : COMMENT FAIRE UN CAPITAL ?